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Crédit photo : © Pixabay

Dans le cadre d’une journée de formation du groupe de l’Eure, Marine Lemasson, experte en nutrition des ruminants, est intervenue sur la thématique de l’élevage des jeunes ruminants. Cet article résume les apprentissages de cette journée.

Quand l’élevage des jeunes a pour objectif de renouveler le troupeau, il s’agit donc de produire les futures laitières/allaitantes. Élever au mieux ses jeunes a pour objectif de ne pas pénaliser leur potentiel (rumen/mamelle), d’avoir des animaux qui se reproduisent bien et tôt, qui vieillissent bien et de maîtriser ses coûts.

Pour cela Marine Lemasson se base sur le respect des phases physiologiques naturelles de développement des animaux. En effet, il y a deux phases de développement chez un jeune : une phase lactée monogastrique puis une phase ruminante polygastrique.

La phase lactée monogastrique

Cette première phase va déterminer la capacité de production de la future laitière / allaitante. Tout commence par avoir une mise bas qui se passe bien. Plusieurs facteurs entrent en jeu :

  • Un petit pas trop gros pour un passage facilité
  • Une mère pas trop grosse (NEC de 3) pour ne pas diminuer la taille du passage
  • Des contractions efficaces donc que la mère soit couverte en calcium pour contracter ses muscles et en magnésium pour les décontracter
  • Ne pas systématiquement aider à la mise bas car c’est une cause de souffrance pour la mère
  • Avoir du colostrum de qualité

Durant les premières heures du jeune : veillez à l’ingestion du colostrum

Le colostrum est le lait secrété par la mère en fin de gestation et donc le premier lait ingéré après la parturition. Dans la nature, les petits en boivent durant les 7 premiers jours. Il est composé de nutriments, protéines, anticorps spécifiques, de défense non spécifiques, de gras, de vitamines, d’oligoéléments et de minéraux. Pour un bon démarrage, le colostrum doit être apporté dans les 6h après la naissance. En effet passé 6h, l’assimilation des anticorps baisse de 90%.

Comment stocker et apporter le colostrum ?

Marine Lemasson recommande d’avoir une banque de colostrum congelé. Le colostrum se conserve 1 mois à 4°C et 1 an au congélateur. Pour le préparer, le réchauffer au bain marie dans un évier rempli d’eau chaude. Pour s’assurer que la température n’est pas trop élevée, il suffit de pouvoir mettre sa main dans l’eau sans se brûler. Ce qui implique que l’eau se situe entre 30 et 40°C, et maximum 60°C. Le veau doit boire 3 à 6 litres dans les 6h et l’agneau 100 ml/kg poids vif.

Si on constate des problèmes sur les jeunes (mortalité par exemple ), il peut être judicieux d’évaluer la qualité du colostrum en le pesant avec un pèse colostrum ou par dosage sérique. La qualité du colostrum est déterminée par la santé de la mère et les sources possibles d’un problème de colostrum sont :

  • Carence alimentaire chez la mère : souvent, il s’agit d’un déficit de protéines fermentescibles il est alors possible d’investir dans un correcteur azoté (tourteau, féverole, pois)
  • Problème de transit (acidose)
  • Carence minérale
  • Qualité de l’eau de boisson (infestation bactérienne, excès de fer)
  • Rang de lactation (max au 3e)
  • Propreté de la mamelle qui est liée à ce que mange la mère et à la propreté des zones de couchage (nettoyer avant la 1ère tétée)
  • Durée de tarissement (au moins 30 jours à 90j)
  • Exposition de la mère aux agents pathogènes (parasitisme, bactéries, virus)
  • Qualité de la récolte si banque de colostrum

Sevrage tardif et allaitement soutenu

Voici les temps nécessaires à la mise en fonctionnement du rumen du jeune :

   Bovin   Ovin
 Le rumen commence à fonctionner  3 mois  1,5 mois
 Le rumen fonctionne  6 mois  3 mois
 Le rumenne fonctionne très bien  14-15 mois  4-5 mois


Marine Lemasson souligne ainsi l’importance du sevrage tardif et de l’allaitement soutenu. Ne pas sevrer un bovin avant 3 mois et un ovin avant 1.5 mois.

Le sevrage tardif et l’allaitement soutenu améliorent :

  • La croissance ultérieure (stimulation hormone de croissance)
  • L’efficacité alimentaire
  • La santé du troupeau (système immunitaire stimulé par hormone de croissance)
  • La production laitière (Vaches laitière : + 500 à + 1 000 kg / lactation, Brebis : + 50 à 100L / lactation)
  • Le nombre de lactations
  • La valeur des engrais/réformes (meilleur poids grâce au format plus grand et abattus plus jeunes si engrais)
  • Baisse l’âge de la puberté et augmente la prolificité

Comment allaiter ?

Pour le veau :

  • 10 L/jour jusqu’à 3 mois en 2 buvées/jour
  • puis 5L/jour jusqu’à 6 mois en 1 buvée/jour

Pour l’agneau :

  • 2L/jour jusqu’à 1.5 mois en 2 buvées/jour
  • puis 1L/jour jusqu’à 3 mois en 1 buvée/jour

Le lait doit cailler dans la caillette du jeune. Pour qu’il puisse cailler il faut que la mère soit bien couverte en potassium et phosphore. Le caillage du lait se teste avec du vinaigre de cidre. S’il caille mal, vérifier la couverture en minéraux et notamment en phosphore par un piltest. Si les vaches perdent leur lait, manque de potassium.

Conseils pour les buvées

  • Inciter à boire doucement grâce à une louve ou un milk-bar. Il est important que les jeunes tètent car ils sécrètent de l’endomorphine, ce qui les rend plus calmes et moins douloureux. Penser à changer les tétines à chaque nouveau lot.
  • Les faire boire bien en l’air pour fermer la gouttière œsophagienne.
  • Faire en sorte qu’il reste toujours un peu de lait après la buvée pour que les animaux soient à satiété, ne se jettent pas sur la prochaine tétée et que la caillette ne déborde pas.

L’allaitement au lait en poudre ça vaut quoi ?

Le jeune ne se nourrit pas de lait mais de fromage issu du lait qui caille dans sa caillette. Or le lait en poudre ne caille pas donc la croissance du jeune sera moins bonne avec du lait en poudre. Si vous n’avez pas le choix, privilégier de la poudre avec des protéines d’origine animale.

Vaches nourrices

Alimenter les vaches nourrices comme les laitières et leur mettre 1 à 3 veaux les 3 premiers mois puis 4 à 6 veaux après 3 mois.

Intégration des fourrages et compléments

La fibre joue un rôle essentiel dans le développement du rumen chez les jeunes ruminants. Dès les premières semaines de vie, l’ingestion de fourrages fibreux stimule la croissance des papilles ruminales et le développement de la musculature de la panse, favorisant ainsi l’augmentation de la capacité d’ingestion et le bon fonctionnement du rumen. Cette stimulation précoce a des effets durables : un rumen bien développé permettra à l’animal adulte de mieux valoriser les fourrages grossiers et d’optimiser ses performances sur des rations à base d’herbe, tout en limitant les troubles digestifs. En somme, l’apport de fibres dès le jeune âge conditionne la future efficacité alimentaire de l’animal.

La découverte des fourrages se fait par des fourrages grossiers : paille et foin. Ne pas apporter de concentrés la première année sauf éventuellement pour nourrir la flore bactérienne si les fourrages sont très déficitaires en protéines et énergie.

Les bactéries du rumen ont besoin d’azote directement disponible qui se trouve dans le pois, la féverole ou les tourteaux. Pour les sources d’énergie lente donner plutôt de l’épeautre ou du maïs grain.

Pour les quantités, distribuer :

  • 750 g à 1.5 kg/jour en 2 repas pour les bovins
  • 75 g à 150 g / j en 2 repas pour les ovins

Objectifs en début de phase lactée (jusqu’à 3 mois en bovin, 1,5 mois en ovin) :

  • Veau : GMQ de 1500 g/j
  • Agneau : GMQ de 400g/j

Si les GMQ ne sont pas à ces valeurs-là :

  • Augmenter les quantités de lait
  • Tester le caillage du lait
  • Surveiller les acidoses des mères donc diminuer l’énergie dans la ration
  • Augmenter la protéine dans la ration des mères
  • Distribuer le lait à 38°C
  • Réguler la matière grasse du lait (écrémer le lait, lait de mélange)

En résumé : l’alimentation du jeune en phase lactée

Veaux

PANSE BETE 40 Juillet 2025 Alimentation des jeunes Veaux

 

Agneaux

PANSE BETE 40 Juillet 2025 Alimentation des jeunes Veaux

La phase ruminale polygastrique : de 6 mois au vêlage et de 3 mois à l’agnelage

Attention ne passer dans cette phase que lorsque le rumen est fonctionnel et totalement efficace donc pas avant 5-6 mois – 200 kg chez le bovin et 3 mois – 40 kg chez l’ovin.

L’objectif est de nourrir les bactéries du rumen et de leur offrir un milieu de vie stable c’est-à-dire sans acidose. Plusieurs pratiques sont favorables au respect des mécanismes de régulation de l’acidité du rumen :

  • Multiplier les repas et étaler la plage d’alimentation (8h/jour) : faire 2 repas égaux / jour, matin et soir.
  • Ralentir la production par les bactéries des acides gras volatiles (AGV) en ralentissant l’ingestion en fournissant un fourrage pas trop appétant et pas trop jeune.
  • Favoriser la production de salive qui contient du bicarbonate et donc tamponne le rumen. Pour cela afin de favoriser les coups de dents et la rumination fournir un fourrage grossier, riche en fibre, avec peu de feuilles et une coupe longue non conditionné. Mettre du sel à disposition à volonté mais veiller à enlever le sel au tarissement donc 1 mois avant la mise bas.
  • Développer les papilles ruminales par l’ingestion de fibres.
  • Ne pas apporter d’énergie fermentescible en excès.