Panse Bête n°17 : pensez vos élevages !

 

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Bandeau17Juillet 2017

Lettre d'information co-rédigée
par les Défis Ruraux et le GRABHN.
Informations techniques et témoignages sont au menu.

Bonne lecture !

 

   Marjolaine Huguet & Jules Duclos, conseillers élevages au GRAB HN
   Céline Déprés, animatrice systèmes herbagers aux Défis Ruraux

 
 

En ce moment

 

Pensez à vérifier l’état parasitaire du troupeau

Surveiller en priorité les jeunes en première et deuxième année de pâture. Les coproscopies permettent d’évaluer la charge parasitaire et de décider ou non d’agir.

 


Nos éleveurs témoignent

 

♦ Nicolas et Sébastien FONTAINE – Polyculteurs-éleveurs de 150 VL, avec transformation – Saint Sauveur d’Emalleville (76) – Pays de Caux – 22 ha de prairies accessibles au pâturage des vaches laitières + 39 ha de praires (témoignage de juin 2017)

 

holsteins

« Nous considerons l'herbe comme une culture à part entière : elle pousse toute seule mais demande une exigence particulière pour sa récolte en fonction de ses objectifs. (...) Cette année, nous commençons à travailler sur la gestion du pâturage, bien qu’il y ait toujours eu une part d’herbe importante sur l’exploitation. Grâce aux échanges en groupe, nous avons commencé le déprimage plus tôt que d’habitude, autour du 10 mars. Nous avons été agréablement surpris par nos « vieilles » prairies temporaires de 6-7 ans en RGA-TB, très portantes en début de saison et encore productives. Par rapport aux années précédentes, j’ai bien réduit la complémentation à l’auge, tout en faisant autant de lait. Je suis plutôt étonné et content de la valorisation de l’herbe. Avec la météo atypique du printemps, les parcelles ont épié plus tôt : nous les fauchons donc une fois à tour de rôle pour gérer les épis et limiter les refus pour la suite de la saison de pâturage. Pour l’année prochaine, nous prévoyons de remettre 5 ha en herbe pour passer la totalité de notre parcellaire accessible en prairies et atteindre une vingtaine d’ares par vache. (...) J’ai aussi essayé d’arrêter le fil avant, ce qui fonctionne bien sur les parcelles en RGA-TB : le pâturage est plus homogène, il y a moins d’herbe gaspillée, et moins de travail ! Par contre, nous le gardons pour faire pâturer les 4 parcelles en RGH-TV, qui nous posent un peu problème (cycle de pousse décalé, et moindre appétence). »

 

MichelVERKEST

♦ Michel et Sophie VERKEST – Polyculteurs et éleveurs de porcs plein air en projet de conversion à l’AB – Colleville (76) – Pays de Caux – (témoignage de juin 2017)

 

 « Depuis 2015 nous élevons des porcs Gascon, Bayeux et Duroc, dans des prairies et des forêts sur une superficie de 10 hectares. Les truies mettent-bas en bâtiment durant l'hiver, et en plein-air dès que le temps le permet. Les porcelets restent pendant 2 mois avec leur mère avant d’être sevrés. L’engraissement se fait en plein air exclusivement. Sur les parcours, toutes nos cabanes sont auto-construites avec du matériel de récupération. La totalité de l’aliment est produit à la ferme sur les parcelles de l'exploitation et garanti sans OGM. La commercialisation se fait entièrement en vente directe avec un projet d’atelier de découpe et de transformation à la ferme. La prochaine étape pour valoriser au mieux nos porcs serait de passer à l’agriculture biologique. »

 

 

 

Réduire son coût alimentaire en réduisant les concentrés


Dans une exploitation laitière spécialisée, le coût alimentaire représente 55 à 70 % des charges opérationnelles. La valorisation de l’herbe pâturée et la réduction des concentrés sont donc deux leviers importants pour maintenir ou augmenter son revenu. Penchons-nous sur l’utilisation des concentrés.

 

Les concentrés au pâturage : un gain de production faible


En cette période, vu la valeur alimentaire de l’herbe pâturée au stade feuillue, souvent à 1UFL/kg MS, est-il nécessaire d’apporter des concentrés pour « densifier » davantage la ration ?
Le taux de substitution de l’herbe pâturée varie avec la qualité de l’herbe. Plus la qualité de l’herbe est bonne, plus le taux de substitution augmente. Pour une entrée dans un paddock à 10-12cm, le taux de substitution est d’environ 0,6. Cela signifie que si on ajoute un kg de concentré, il prendra la place de 0,6 kg d’herbe, qui ne sera pas ingérée par l’animal.
Si on ajoute 1 kg de concentré VL à 1 UFL (type VL 2,5), la quantité d’herbe ingérée diminue de 0,6 kgMS. Lorsqu’elle est pâturée au stade feuillu, l’herbe vaut 1 UFL/kgMS, on perd donc 0.6 UFL herbe pour 1 UFL concentré apporté, soit un gain final de 0.4 UFL. Une partie des UFL supplémentaires est ensuite mobilisée par l’animal pour ses réserves corporelles.


 Concentres 
Luc Delaby, chercheur à l’INRA, 2015


Au bilan, l’ingestion d’1 kg de concentrés apporte 0,4 UFL dont 0.28 UFL produiront du lait. Comme il faut 0,44 UFL pour faire 1kg de lait, on gagne donc 0,64 kg de lait (0,28/0,44).
Entre l’apport d’un kilo de concentré au pâturage et du pâturage plat unique, on ne gagne donc que 0,64 kg de lait, à cause de l’ingestion moins importante de l’herbe.
La quantité de lait produite en plus ne permet pas de compenser le surcoût du concentré, et ceci sans compter le temps de travail nécessaire à la distribution de ces derniers.  

 

    En conventionnel 

 En agriculture biologique

 

Ajout de 1 kg de concentré au pâturage 

 

 A 200 €/t de concentré
→ 0.20 €
 A 450 €/t de concentré
→ 0.45 €
 Gain de 0,64 kg de lait  A 330 €/1000 litres
→ 0.21 €
 A 450 €/1000 litres
→ 0.29 €
 Bilan      - 0.01 €  -    0.16 €


    
Lorsque les vaches pâturent une herbe de bonne qualité et qu’elle représente la totalité ou la majorité de la ration, il n’est pas pertinent d’apporter des concentrés. D’où l’intérêt de bien conduire le pâturage pour réaliser des économies de concentrés.

 

Et sur l’année entière ?


Il est aussi intéressant de calculer cet indicateur sur votre ferme. Dans le Réseau CIVAM, le repère de 160 g de concentrés/litre est largement utilisé. Au-delà de ces 160 g/l, il y a probablement du gaspillage. Un mélange fermier vous permettra de sérieuses économies par rapport à un aliment du commerce, quitte à acheter un peu de correcteur.


Comparaison de deux systèmes à la ferme expérimentale de Trévarez (1992-2001)
Avec l’augmentation des potentiels génétiques de production de ces dernières années, on peut choisir deux stratégies pour les vaches à haut niveau de production : exprimer le potentiel (mais à quel coût ? vu les prix actuels du lait et des céréales…) ou adapter la production des vaches au niveau de lait permis par les fourrages.
Sur la ferme expérimentale de Trévarez en Bretagne, des essais ont été menés entre 1992 et 2001. Différents niveaux de concentrés étaient testés et les vaches pâturaient au moins 2 mois sans complément à l’auge, sur minimum 25 ares/vache.

 

Impact de la baisse des concentrés sur la production laitière
En moyenne, sur l’ensemble de la lactation de chaque vache, la réduction des concentrés avait entrainé une baisse de 0,9 kg de lait par kg de concentré (avec 30 % de primipares). Sur l’année, apporter 500 kilos de concentrés supplémentaires ne permet donc de gagner que 450 kg de lait en plus…
Mais si les concentrés remplacent une ration de base peu coûteuse telle que l’herbe pâturée, il n’y a pas de gain économique (même raisonnement que ci-dessus). On comprend donc l’intérêt de récolter des fourrages de qualité également pour l’hiver.
Qu’en est-il pour les taux ? La baisse de 100 kg de concentré/VL/an entraînait une diminution du TP de 0,8 pt et augmentation du TB de 2,5 pts.

 

Et l’état sanitaire du troupeau ?
Aucun effet n’était observé sur l’état au vêlage et les pertes d’état en début de lactation dans les lots à bas niveau de concentrés. Si les concentrés sont diminués une fois que la gestation a démarré, les performances de reproduction ne sont pas non plus affectées.
La mise en place d’une stratégie de réduction des concentrés doit aussi s’accompagner d’autres stratégies de gestion du troupeau : écrêter le pic de lactation, limiter le déficit énergétique et jouer sur les dates d’insémination.

 

Entretien des prairies : améliorer ses pratiques ou rénover ?


renouvellement de prairie

La prairie est un mélange de graminées et de dicotylédones. Les dicotylédones peuvent être séparées en deux catégories : les légumineuses et les diverses. Les espèces en présence ne sont pas le fait du hasard. Elles sont liées au milieu, aux pratiques et à l’âge de la prairie. Le vieillissement d’une prairie se traduit par la disparition de certaines espèces et l’arrivée de nouvelles dans le couvert. Comment assurer le maintien d’une flore de qualité dans le temps malgré le vieillissement? Comment savoir s’il faut rénover sa prairie ?


Poser un diagnostic sur sa prairie avant d’agir


Pour poser un bon diagnostic il faut d’abord prendre en compte les objectifs de l’éleveur concernant cette prairie, c'est-à-dire sa place dans le système, et le milieu dans lequel elle se développe (séchant, humide, inondable, pauvre, etc.).

 

Ensuite on observe :

  • l’hétérogénéité du couvert, c’est « la gueule » de la prairie : pente, gradient de fertilité, zones humides, zones séchantes…
  • la structure du couvert :
    • homogène = Toutes les espèces sont en mélange homogène dans la parcelle
    • hétérogène = Les différentes espèces forment des tâches ou des mosaïques dans la parcelle
  • la densité du couvert : présence ou absence de trous
  • la morphologie du couvert : gazonnant ou en touffes
  • la flore présente : c’est une bonne indicatrice de l’état de la prairie.


Une fois tout ceci réalisé, le tableau ci-dessous permet d’évaluer le niveau de « dégradation » de sa prairie.

 

etat de la prairie

 

* Les espèces indésirables : graminées à faible valeur fourragère ou très envahissantes et/ou dicotylédones à fort pouvoir de colonisation


Dans  80 % des cas, améliorer ses pratiques suffit à avoir une flore de qualité

 

Après le potentiel de sol, le mode d’exploitation et de fertilisation est le premier facteur qui influence la flore d’une prairie :

  • La fauche sélectionne les plantes à port dressé.
  • La fauche à foin sélectionne les plantes précoces car elles auront le temps d’épier et de se ressemer.
  • Le pâturage sélectionne les plantes qui engazonnent.
  • Le surpâturage nanifie la végétation et crée des trous.
  • Une grande disponibilité en azote favorise les espèces les plus agressives et diminue la diversité (notamment les légumineuses).
  • MOINS le potentiel du sol est important, PLUS la diversité des espèces est grande.

Pour avoir une prairie équilibrée il est conseillé de :

  • Pratiquer le pâturage tournant
  • Alterner les modes d’exploitation lorsque c’est possible :
    • Fauche/pâture
    • Fauche précoce/fauche tardive
    • Valoriser l’herbe d’automne : une journée pâturée après le 1er novembre permet de décaler la reprise (donc l’exploitation) d’une semaine tout en conservant la productivité
  • Analyser son fourrage ou son sol pour adapter sa fertilisation Eviter le surpâturage aux périodes critiques (été ou hiver) : sortir à 6-7 cm

Le sursemis pour des prairies moyennement dégradées


Le sursemis consiste à renforcer ou compléter la flore d’une prairie existante sans destruction du couvert en place. Il fonctionne 1 fois sur 4 en moyenne. La réussite est d’abord liée aux conditions climatiques intervenant après le semis pour permettre une levée rapide des espèces implantées. Pour avoir un maximum de chances de le réussir :

  • Surpâturer avant le semis, par exemple avec les grosses génisses.
  • Herser
  • Semer dense en conditions humides (5-6 kg/ha de trèfle)
  • Faire pâturer rapidement pour rappuyer.
  • Faire plusieurs passages de pâturage pour épointer et donner de la lumière.
  • Prendre des espèces qui lèvent vite : trèfle blanc, trèfle violet

Il faut agir 6 à 8 mois après l’arrivée des premiers trous de la taille d’une petite assiette à dessert, en ressemant l’espèce qui a disparu (vérifier tout de même qu’elle était adaptée aux conditions).


Rénover les prairies très abîmées


La rénovation n’est utile que dans un milieu favorable. Dans un milieu à fortes contraintes les espèces sélectionnées ne sont pas adaptées et les espèces natives vont revenir en peu de temps. Sur des petites terres, il faut donc mieux jouer sur le mode d’exploitation pour améliorer la flore que réaliser une rénovation, quitte à redécouper les parcelles en fonction de leurs contraintes si elles sont hétérogènes : une partie coteaux, une partie humide, une partie séchante... Leur gestion sera optimisée
Il est très important de prendre en compte le diagnostic pour choisir les espèces à ressemer, si le dernier semis n’a pas fonctionné, c’est peut être que les espèces choisies n’étaient pas adaptées.
Entre 2 prairies il est préférable de mettre au moins 1 ou 2 ans de céréales ou de mélange céréalier pour consommer l’azote après le retournement.

 

Exemple d’itinéraire technique :

  • casser la prairie
  • année 1 : céréale
  • année 2 : méteil + prairie sous couvert

Source : Guide pour un diagnostic prairial, François HUBERT et Patrice PIERRE

 

 renouvellement prairie

 Une prairie à rénover : peu de graminées d’intérêt, peu de légumineuses, beaucoup de diverses

 

 


Trucs et astuces

 

Pâturage maîtrisé = topping évité

 

faucheuseOn entend de plus en plus parler du topping, notamment en cette période d’épiaison. Lumière sur cette méthode qui peut s’avérer intéressante dans certains cas, mais qui ne doit pas se transformer en excuse pour sortir le tracteur !


Qu’est-ce que le topping ?
Le principe du topping est de faucher un paddock avant de faire entrer les vaches pour le « pâturer ».
La parcelle est fauchée 6 à 12 h avant l’entrée des vaches (24 h maximum), pour que l’herbe reste appétente. Il ne faut donc faucher que la surface nécessaire à l’alimentation du troupeau pour une journée, et sortir une fois la parcelle terminée. Cela impose donc des paddocks d’une journée ou un fil avant.

 

Avantages
Cette technique permet d’anticiper des éventuels refus. Faucher en amont abîme moins la plante qu’un broyage au girobroyeur après la sortie des vaches, offre une coupe homogène et limite le surpâturage (les vaches mangent ce qui est coupé au lieu d’insister sur les zones appétentes). Ainsi, une bonne dynamique de pousse est conservée et moins de résidus de fauche/broyage se retrouvent sur la parcelle, ce qui joue en faveur du trèfle. Le topping permet également d’intervenir sur les adventices au bon stade.

 

Inconvénients
Evidement, comme toute intervention mécanique, les trois principaux inconvénients sont le coût, le temps de travail et l’utilisation d’énergie fossile. Ensuite, la surface fauchée doit représenter exactement ce qui va être mangé par les vaches, sinon le paddock sera surpâturé ou présentera des résidus importants (gaspillage et étouffement du trèfle).


Mieux vaut se concentrer sur le pâturage
Si les principales règles du pâturage tournant sont respectées, et notamment la sortie à 5 cm, le topping n’aura pas lieu d’être utilisé, sauf pour « faire propre », les refus amers autours des pissats et bousats étant mangés au tour suivant.
Finalement le topping n’est intéressant que dans de très rares cas, comme cette année lorsque une bonne partie des graminées ont épié d’un seul coup à des hauteurs faibles et que les stocks sur pieds insuffisants ne permettaient pas de faire du foin. Ainsi, il est envisageable d’effectuer un topping sur les parcelles infestées de chardons et présentant de grosses touffes de dactyle épiées.

 


Agenda


29 juin
Journée Santé Animale dans l'Eure - Autour du vêlage
Infos : Céline

 

4 et 5 juillet
Voyage d'études en Vendée "Produire sa propre complémentation"
Infos : Céline

 

11 juillet à Rouvres (14)
Tour de Plaine chez Guillaume Charpentier, rotations diversifiées : légumes de plein champ, cultures de printemps, chanvre

Infos : Marjolaine ou Jules


Crédits photos : L. Tillier, Pixabay, GRAB HN, Défis Ruraux.

 
 


 

LA PLUME EST À VOUS...

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