RCN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Éviter les pièges...

Ce début de printemps froid a pu mettre sous tension de nombreux éleveurs pâturant : difficile de garder la bonne humeur lorsque les prairies ne poussent pas et que les stocks en sortie d’hiver sont bas ! Cette période de froid a laissé place à une vague de chaud, puis à des pluies orageuses qui stagnent depuis plusieurs semaines. Ceux qui ont pu faucher avant les orages ont des stocks bien reconstitués. Prochaine étape : réussir son pâturage estival !

Les résultats du projet Perpet sur le pâturage estival : pâturer ras l’été mais sans surpâturer !

Faut-il respecter une hauteur de sortie en été pour éviter le surpâturage ? Quel est l’impact de la sévérité du pâturage en conditions séchantes sur la pérennité de la prairie ? Durant le projet Perpet, 11 fermes situées en Loire Atlantique, Mayenne, Vendée et Maine-et-Loire, ont mené une expérimentation pour tenter de répondre à ces questions.
Le protocole mis en place consistait à suivre des pratiques différenciées sur 2 paddocks de la ferme, entre le 15 juin et le 15 septembre : sortie des animaux à 4 cm herbomètre dans le paddock témoin contre 8 cm pour le paddock expérimental.

IMG 2756
Des relevés floristiques ont été réalisés sur les deux zones au printemps de chaque année, complétés par des relevés de biomasse au printemps mais aussi à l'automne. Les éleveurs.euses engagé.es ont enregistré leurs pratiques de pâturage tout au long de l'année sur les 4 ans d’expérimentation.

Pour quels résultats ? Cette expérimentation sur la sévérité du pâturage en période estivale n'a pas permis d'identifier d'impacts significatifs de la hauteur de sortie de pâturage. Dans les conditions des essais réalisés sur 11 fermes, un pâturage ras durant la période estivale n'a pas impacté la flore de la prairie. Par contre, les éleveurs.euses ont été vigilants sur la pression de pâturage et le temps de retour après pâturage estival, comme le souligne Hubert Poisbeau (éleveur dans le 44) : « Dans un souci d'économie (l'herbe pâturée est le fourrage le moins cher), nous avons pour objectif de faire durer le pâturage le plus longtemps possible. Avec la surface accessible que l'on a, je pense que pâturer ras nous permet de gagner une semaine de pâturage à la mi-juillet. Après, il faut rester vigilant, pâturer ras ne signifie pas surpâturer. Après le passage des vaches en juin-juillet, il faut attendre qu'il y ait de l'herbe avant de pâturer afin de ne pas fatiguer la prairie. »
Pour mieux comprendre les facteurs de pérennité des prairies temporaires d’association graminées-légumineuses, consultez tous les résultats du projet Perpet.

 En période estival, il est primordial d’éviter tout surpâturage !

 Plusieurs groupes CIVAM se sont formés sur les prairies multi-espèces avec Patrice Pierre de l’Idele (cf article ci-dessous). Durant ses interventions, de riches échanges se sont portés sur le choix des mélanges et l’implantation des prairies ainsi que sur la question de l’adaptation au changement climatique.
Il a ainsi souligné qu’avec les connaissances actuelles, il semble que peu d’espèces/variétés peuvent à la fois tenir l’été tout en restant en forme. Il est difficile de trouver des plantes qui ont une repousse estivale : l’objectif est surtout de faire en sorte qu’elles ne meurent pas.

Ce qu’il faut bannir, c’est donc le surpâturage (= un pâturage qui aboutit à la formation de « trous » dans le couvert) en sécheresse estivale. En effet, certains constituants du mélange vont disparaître et les mousses puis des adventices vont remplir les trous. On retrouve ce phénomène « bouche-trou » dans les prairies de fauche étant donné que des espèces choisies à port dressé laissent des trous au pied. En surpâturant l’été en particulier, des plantes en rosette seront naturellement sélectionnées.

 

Gérer les manques… mais aussi les excès !

Après un printemps tardif et explosif où la végétation s’est développée très rapidement, on peut vite se retrouver avec de l’herbe épiée sur des prairies pourtant prévues pour du pâturage. Comment faire pour limiter le gaspillage ?
Une solution peut-être le fauche-broute (aussi appelé topping).

Cette pratique consiste à faucher l’herbe juste avant l’entrée des animaux. La veille ou le jour même, le paddock correspondant au repas est fauché. Après avoir légèrement séchée sur le champ, l’herbe est consommée directement par les vaches (ou autre herbivore). La consommation d’herbe par les animaux n’est pas affectée par la fauche. Au contraire, les animaux ne trient pas et ont même tendance à manger un peu plus car ils consomment tout ce qui est épié.

Cette technique permet de gagner du temps sur la repousse de l’herbe : le broyage abîme les plantes et laisse beaucoup de biomasse morte qui étouffe les repousses notamment pour les légumineuses. De plus, le fauche-broute permet de limiter la propagation des adventices (rumex, chardons...). En effet, une fauche en juin permet de casser le cycle des adventices qui sont en pleine floraison (ex. chardon). La production de graine est stoppée et les plantes sont affaiblies.
Le fauche-broute reste un outil d’aide au pâturage, qui ne doit pas être utilisé systématiquement car celui-ci a un coût (même s’il est moins important qu’un broyage car moins consommateur en fuel). L’intervention mécanique est donc conseillée uniquement si on estime que les animaux vont laisser des refus importants et qu’un broyage sera nécessaire (le fauche-broute permet alors de ne pas avoir à faire ce broyage). Voir plus d’informations sur cette pratique.

_______________________________________________________________

[1] Pression de pâturage estival moyenne : 2 ares/UGB/jour, temps de retour moyen après pâturage estival : 73 jours